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Statue ou stature ?

Dans la presse automobile, il est d’usage de faire des comparatifs entre marques et modèles. Je vais m’adonner au même exercice avec un comparatif publicitaire entre deux constructeurs : le français Renault et l’allemand Opel dont les points communs sont perceptibles. Ces deux constructeurs généralistes ont un problème de positionnement middle market avec une image de marque moyenne qui vise à toucher un consommateur moyen ; or, être dans la moyenne aujourd’hui est un défi sur des marchés qui tendent vers le low cost et tirent vers le premium.

Renault et Opel sont de bons constructeurs avec des motorisations fiables, mais l’esthétique de leurs véhicules n’invite pas à la palpitation. Ces derniers temps, l’un et l’autre ont fait montre d’efforts avec des modèles comme le crossover expressif Renault Captur ou la citadine chic Opel Adam qui indéniablement apportent un vent de contemporanéité à des gammes qui font bailler.

N’empêche, rouler en Renault ou en Opel n’est pas ce qui s’appelle être « branché », et je ne parle pas ici des performances des véhicules qui n’ont pas à rougir, mais encore une fois d’image de marque molle et sans attrait qui ne flatte pas l’œil du consommateur en recherche de vibration automobile. Pour pallier cette pâleur, les deux constructeurs multiplient les appels du pied sur l’accélérateur dans le but de dorer leur fade blason. Une dorure qui passe par le design déjà évoqué et en relais de séduction, la communication ; ainsi, l’un et l’autre ont décidé de jouer la carte du celebrity marketing en faisant appel à une égérie pour apporter de la chair à leur marque un tantinet désincarnée.

Opel a choisi Claudia Schiffer, mannequin allemand qui symbolise la perfection et le sérieux… à l’allemande ! Renault a choisi Kevin Spacey, acteur et producteur américain qui personnifie l’intelligence psychanalytique et l’élégance racée… à la française !

En privilégiant des stars à la renommée internationale, les deux marques visent l’universalité. A quelques nuances près. Claudia Schiffer est une belle femme, l’archétype du mannequin à la plastique enviée, une femme souriante, cosmopolite, agréable, sympathique, mais qui ne transcende pas par son charisme. Elle fait partie de cette génération de mannequins à qui on demande de prendre la pose et rien de plus. Kevin Spacey est une personnalité beaucoup plus complexe, qui n’attire pas par sa beauté physique, mais par un charme maîtrisé et un caractère qui n’a eu de cesse de monter en puissance à travers une filmographie rigoureuse. Claudia Schiffer est par nature un support publicitaire, c’est son métier ; ce n’est pas le cas de Kevin Spacey qui ne prête que très rarement son image à des enjeux commerciaux.

En engageant ces personnages médiatiques, les deux constructeurs cherchent à forcer leurs futurs acheteurs à les regarder différemment : c’est le rôle d’une stratégie de celebrity marketing bien pensée et bien engagée où la célébrité sélectionnée ne doit pas être « plaquée » à la marque, elle doit être complice, être avec elle une alliée naturelle qui la flatte, qui la hausse. Pourtant, force est de constater qu’Opel ne parvient pas vraiment à sortir de son image de constructeur allemand sérieux, marque d’ingénieur laborieuse. Claudia Schiffer apporte une note de glamour, rien de plus, elle est une statue qui fige un peu plus la marque dans son ennui germanique ; Claudia Schiffer n’est pas vraiment un porte-étendard, plutôt un portemanteau, elle ne vit pas l’automobile, elle la subit comme dans un défilé de mode où les mannequins font souvent mine de croire aux défroques qu’ils endossent.

A l’inverse, Renault a fait un coup de maître en choisissant Kevin Spacey (déjà un effet de surprise qu’Opel n’est pas parvenu à créer) qui, au volant de la nouvelle Espace V démontre avec un brio d’acteur que le véhicule dans lequel il s’expose est une œuvre achevée à sa hauteur d’homme de caractère. Une hauteur parfaitement exprimée dans le sobre film publicitaire qui donne indéniablement une stature à la marque au losange qui en manque singulièrement. Renault vise le premium, il a déjà gagné une marche sur le podium de l’image de marque, reste à la qualité perçue des véhicules de convaincre les réticents, les hésitants. Renault a très bien étudié la stratégie de Nespresso incarnée par George Clooney, une stratégie de longue haleine, exigeante, il faudra au constructeur tenir la distance, respecter le slogan de l’Espace V qu’il promeut : « Le temps vous appartient… » Bâtir une marque prémium demande en effet un souffle long et constant. Quant au constructeur allemand, il n’a pas vraiment raté sa démarche d’améliorer son image, mais rouler en Opel n’est toujours pas un impératif : moyen tu demeures, moyen tu meurs…

Images et films : © Opel - © Renault

Tag(s) : #Marques
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