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« Il traverse des pays, des jardins, des livres, des poèmes, des mouvements artistiques où chaque fois il prend la source de la modernité de sa composition. » De qui, de quoi, parle-t-on ? Du parfum N°5 de Chanel dont Jean-Louis Froment,  commissaire d’une exposition qui lui est dédiée et présentée jusqu’au 6 juin au Palais de Tokyo, en vante les contours avec une emphase lissée par la direction de la communication de la célèbre maison de la rue Cambon. Une exposition mastodonte et faussement culturelle, et avant tout un exercice marketing déguisé en alibi muséal qui entre dans le cadre du Guest Program (sic !) du Palais de Tokyo. Programme qui, pour ce lieu de création, est avant tout une façon de récupérer des expositions commerciales contre de généreuses rétributions financières : les musées ayant de moins en moins de budgets, ils se condamnent à louer leurs cimaises aux publicitaires et aux marketeurs trop contents de parader. Et à cet égard, les marques de luxe sont très friandes de diversion marchande et de vernis curateur pour justifier la singularité et le prix de leurs produits.

Dans le domaine du parfum haut de gamme, qui a perdu depuis bien longtemps de sa superbe par une vulgarisation mass market, les marques cherchent par tous les moyens à redorer leur blason terni par le mercantilisme rouleau compresseur. Et plus encore sur un marché fortement compétitif avec bon an mal 400 nouveautés qui viennent à chaque millésime se glisser dans des linéaires déjà surchargés de senteurs élaborées à la va vite.

Pour sortir de cette banalisation, un premier axe « parfums de niches » et « éditions limitées » tentent de flatter des clients en recherche d’exclusivité. L’autre axe consiste à créer des fragrances porteuses de sens olfactifs et à soigner l’emballage, plus précisément d’imaginer un flacon ciselé dans la masse, un flacon qui en jauge plus qu'il n'en jette. En effet, la tendance est au flacon en verre qui pèse lourd par une obésité contrôlée, une façon pour les marques de luxe de donner davantage de poids au prix affiché et en rappelant symboliquement aux clients qu’ils n’achètent pas de la camelote, qu’ils ne s’emparent pas d’un parfum léger sans corps ni âme…

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Baiser Volé de Cartier, Me de Lanvin, Candy de Prada, See by Chloé, La Vie est Belle de Lancôme, etc. : tous ces flacons révèlent un « gros cul » pour souligner leur assise, occuper la place, bomber le torse ; le plus impressionnant étant le parfum Jour d’Hermès qui en impose par sa lourdeur fessière assez peu gracieuse pour tout dire.

Et pour faire écho à l’exposition culturo-marketing de Chanel et son fameux N°5, Lancôme a produit un film entièrement dédié au flacon très séant de sa dernière fragrance, La Vie est Belle, un éloge appuyé, très appuyé au poids du verre… Qu'importe la fragrance pourvu qu'on ait le flacon, le nouveau mantra des parfumeurs ? 

 

  

Images : © Cartier, Lanvin, Prada, Chloé, Lacôme, Hermès

 

Tag(s) : #Tendances
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