Le monde médiatique qui nous harcèle à longueur d’ondes et d’images chaque minute, se régale des raccourcis racoleurs pour se faire voir et se faire entendre. A tel point qu’un certain Donald Trump impose un nouveau mode de communication politique via Tweeter : 140 signes aboyés au gré de ses humeurs faisant fi des conventions diplomatiques. Trump n’est pas un homme de dossiers ni de consensus, il va gouverner à l’instinct, immergé qu’il est dans cette société de l’immédiat et de l’émotion où la forme a pris le pas sur le fond. Malgré (ou à cause de) son aspect ringard, sa brutalité, sa grossièreté et son populisme haineux, le nouveau Président des Etats-Unis est un homme politique du 21ème siècle dont la vision se limite au court terme, aux escalades et aux descentes verbales dont se repaissent les médias sociaux.
Les démocrates bon ton s’étranglent et nous promettent l’apocalypse, pour autant il faut admettre que les politicrates actuels enfermés dans leurs palais « démocratiques » n’ont toujours pas compris que le monde avant changé. Trop occupés à créer des règles, des lois, des normes, des taxes et des impôts, cette classe politique hors sol, molle et à la fois prédatrice reste engoncée dans un mode de gouvernance à bout de souffle rejeté par les peuples.
Trump a gagné parce qu’il agit comme Uber : bousculer une organisation existante, conquérir un marché avec agressivité, apporter une solution immédiate et flexible à une attente posée, sans se préoccuper de la lourdeur institutionnelle évoquée plus haut, ni des conséquences à terme.
L’ubérisation du monde économique, sociale et politique remâchée à longueur d’articles et de reportages n'est généralement analysée que sous l’angle de la protection sociale, de la flexibilité du travail, de l’exploitation d’un lumpenprolélariat qui n’auraient plus d’autres choix que de subir un système qui les exploite peu ou prou. En réalité ce barbarisme d’ubérisation, employé à outrance, déforme et traduit mal la transformation profonde et irrémédiable de notre société : la fin des intermédiaires nuisibles — sociétés et pouvoirs publics — qui créent de la complexité et de la lourdeur, des coûts indus et des règles inutiles. Les individus, les citoyens, les consommateurs, les travailleurs veulent une relation directe avec ceux et celles qui servent leurs intérêts dans un langage qu’ils comprennent.
Nous sommes de plain pied dans une société binaire où les relations bilatérales ne supportent plus aucun filtre, aucun frein. La défiance des grands systèmes est telle, que « l’ubérisation » du monde (je le place entre guillemets à dessein), malgré ses faiblesses et ses périls, met en selle la seule loi qui vaille : celui qui a tort est celui qui se tait et n’agit pas. Faut-il s’en plaindre ?
Image : D.R.