Malgré des communiqués positifs des promoteurs, les centres commerciaux connaissent une diminution sensible de leur activité, ou même définitive au point de disparaître comme c’est le cas aux Etats-Unis où nombre de shopping malls deviennent des friches industrielles, 15% ont fermé ces dernières années selon Green Street Advisors. Pour autant, il ne faut conclure trop vite la mort de ces paquebots du commerce amarrés en lisière des métropoles ou au cœur des villes. Inventé dans les années 50 aux USA, le concept de « centre commercial » a évolué, évolue et évoluera encore. Bousculé par le e-commerce, le revival du commerce de proximité et un forme de spleen économique de la part des clients blasés, le centre commercial doit apporter une nouvelle dimension plus expériencielle et moins « bassement » mercantile.
Le 30 novembre dernier, le promoteur Apsys Group mandaté par la Cité des sciences et de l’industrie, a ouvert « Vill’Up » sur 24.000 m2 laissés libres d’usages dans les célèbres abattoirs de la Villette devenus faut-il le rappeler « un établissement public de diffusion de la culture scientifique, technique et industrielle » en 1986.
Ce shopping mall annoncé en fanfare comme un lieu qui, je cite le dossier de presse, « réinvente le retailtainment grâce à une expérience shopping et loisirs totalement inédite ». Un lieu de destination avec « Happy vibes garanties, pour petits et grands, fashionistas et foodistas, fun addicts et cinéphiles, fous de culture et shoppeuses folles, en famille, en solo ou entre amis. » Tout cela jargonne l’anglo-marketing racoleur et essentiellement au féminin vous l’aurez remarqué, et bien que n’étant pas dans la cible, je me suis quand même rendu en pleine semaine et dans l’après-midi, le 14 décembre pour ne rien vous cacher, dans ce temple de la « vibe » pour en apprécier le frisson culturo-marchand où la fréquentation ne présentait pas son meilleur profil en cette période d’achats de cadeaux de Noël… Nullement bousculé par une foule hagarde ou hystérique, j’ai pu en apprécier les contours.
En accord avec le bâtiment industriel de la Villette, le décor revendique une posture branchée-urbaine-cool « happy loft » (sic !) très largement inspirée de l’esprit du Mama Shelter, ce concept d’hôtellerie novateur initié par les Trigano : à Vill’Up, on retrouve ici et là des emprunts à Philippe Starck qui a aménagé les hôtels… Considérons cela comme un hommage.
Avec une cinquantaine de boutiques dont 18 restaurants sur 4 étages, Vill’Up reste à taille humaine, sans pour autant donner de palpitations aux accrocs du shopping tant l’offre est courte et sans surprise, très orientée enfant. Mais il est vrai que nous sommes dans un centre familial avec un cinéma Pathé Imax, une soufflerie iFly pour faire de la chute libre et voler (très rigolo et impressionnant, mais cher 50 € le vol en moyenne) et un parc d’attractions spatiales You Moove Stations pour faire des voyages virtuels dans l’espace. Est-ce que tout cela « révolutionne le retailtainment » et imposera Vill’Up comme un nouveau lieu de destination parisien sachant que le promoteur attend 10 millions de clients par an, soit l’intégralité des visiteurs qui fréquente le Parc de la Villette ? La Cité des sciences et de l’industrie sa voisine n’en accueille « que » 2,7 millions chaque année, il faudra de l’énergie à Apsys Group pour s’imposer comme un nouveau pôle de la distraction marchande dans une ville qui n’en manque pas.
Images : © Apsys Group