La semaine dernière la presse française s’est fait l’écho d’articles parus dans les journaux anglo-saxons sur Paris et ses habitants qui transpireraient l’ennui, se
coucheraient trop tôt et se révèleraient être d’infâmes pervers ! Damned !
Cette attaque en règle somme toute assez banale de la part des Américains mais surtout de nos voisins anglais, enchaîne les lieux
communs ressassés à l’envi : gargotes immondes, serveurs grincheux, rues sales, chauffeurs de taxis grossiers, cyclistes en Vélib’ inciviles (ça c’est nouveau), populations détestables… Tout
cela n’est pas contestable, mais le trait est forcé. Dire que « Paris est terriblement has been »
est en soit une antienne, cette ville étriquée dans son périphérique n’a jamais été moderne, jamais vraiment été fun, parce les Français sont un peuple petit bourgeois, conservateur et
nostalgique qui n’aime pas être dérangé par les étrangers. Ce n’est pas franchement du racisme, mais une hostilité méprisante pour quiconque ne « causoit pas la langue de Molière » et
fait du bruit. Paris est une ville de vieux à petits chiens et de bobos qui n’aiment pas qu’on réveille leurs mouflets qui dorment sur rue. Evidemment, c’est désolant pour la première
destination touristique au monde. Témoignage de l’attrait d’une ville qui offre un visage multiple, des monuments magnifiques, des riches musées, des tables délicieuses, des beaux hôtels, des
places de villages surprenantes, des rues ombragées, des avenues majestueuses et une surface commerciale enviable. Sans oublier une certaine pompe qui n’est pas pour déplaire aux badauds flanqués
de leur appareil photo numérique qui mitraillent à tout va.
Canardant à vue, la presse anglo-saxonne n’a d’yeux que pour Londres (ville incontestablement attrayante) et surtout Berlin, la destination tendance en Europe. Berlin est plus débridée, plus
inventive, plus cool, plus « arty », plus « twist »…, c’est vrai. Mais la capitale allemande est moche. Plus verdoyante et plus étendue que Paris, mais
hirsute, un assemblage de bric et de broc de styles raides et sans charme (à part quelques quartiers égarés), sans compter que le remaillage entre l’Est et l’Ouest n’est pas encore achevé et loin
d’être convaincant
Heureusement, tous les Britanniques ne tirent pas à boulets rouges sur nos côtes. « Tout est mieux à Paris : l’ambiance, la nourriture, le sexe, la lumière, flâner le long des rues main
dans la main. On pense même mieux à Paris. J’ai perdu le compte du nombre de librairies sur lesquelles je suis tombé. On a
même l’impression qu’il y a plus de librairies anglophones à Paris qu’à Londres », déclare le chroniqueur anglais Nicholas Lezard dans News Statesman (cité par Courier International du 18
février). Ouf… on se sent moins seul.