Beaucoup le vivent comme une punition injuste : la météo n’est pas des plus clémente sous nos cieux aux allures d’automne, sauf à profiter des grillons du pourtour méditerranéen… Une climatologie idéale pour se réfugier dans les musées et cultiver son œil. La capitale française en regorge et de beaux, autrement plus attractifs que le barnum Paris Plage rincé une nouvelle fois par un été pourri (j’en ris).
Ainsi, les touristes toujours plus nombreux se pressent aux portes du Louvre, musée superlatif orné de très belles œuvres dont la fameuse Joconde qui les attirent comme des mouches à la lumière. Reste qu’ils ont failli ne jamais voir ce tableau emblématique invité à parader dans une exposition florentine pour une longue durée. Or, le Louvre sans la Joconde, c’est comme un gâteau sans la cerise, un pâle assemblage dénué de saveurs ou presque. Pour ne pas vexer nos voisins italiens, les éminences du musée parisien ont déclaré la Joconde souffrante, balafrée par une vilaine et discrète fissure qu’un transport ne pourrait qu’aggraver. La dame est âgée malgré un immortel sourire et une mine parfaite qui n'a pas été lissée par le vernis du temps.
Cet incident souligne la fragilité d’œuvres d’art inestimables qui voyagent régulièrement pour des prêts temporaires à travers le monde. Notamment avec la multiplication des grandes expositions médiatiques dont l’alibi historique est souvent mince : la « société du spectacle » exige un exhibitionnisme à tous les étages, la forme sans le fond.
People plane sur son châssis accrochée à une cimaise, la Joconde est une icône usée par des excès d’exhibition, pourtant, impossible de tirer le rideau et sa révérence, « the show must go on ». Pourquoi alors ne pas y mettre une copie et la laisser reposer en paix dans une maison de retraite climatisée ? Il existe plein d’exemples où des artefacts remplacent des originaux (la grotte de Lascaux, les chevaux de Marly…), aujourd’hui, le tourisme de masse ne recherche pas l’authentique, il veut vivre la forme sans le fond, il s’accommode des ersatz, l’important pour lui est de dire « j’y étais » avec une photo souvenir comme témoin.