La Bourse de Commerce à Paris, transformé en temple de l’art contemporain par François Pinault, fondateur du groupe Kering et collectionneur hors ligne, époustoufle par sa beauté méditative et son élégance tendue qui relie des époques esthétiques en opposition apparente et pourtant en communion totale, mi passé, mi futur. François Pinault et Tadao Ando, promoteur de la geste architecturale modeste, ont posé une balise signifiante en suggérant comment le capitalisme peut gérer l’ambiguïté du gain immédiat et du don mémoriel. Comme le furent les Médicis, dantesques tyrans, fantastiques mécènes.
Les marques de luxe sont dans cette gestion du temps historique et de l’hystérie médiatique, une élasticité schizophrénique qui les oblige à prendre du recul et à s’interroger sur leur postulat : « vendre des produits inutiles à des gens qui n’en n’ont pas besoin ». Ce n’est donc pas une simple opportunité si elles entrent en compétition sur le terrain de l’art.
Paris accueille déjà la Fondation Cartier pour l’art contemporain créée par Alain-Dominique Perrin (ADP pour les familiers) depuis 1984, pionnière et vraiment d’avant-garde, un laboratoire stimulant, énervant, innervant. En 2006, arrive à quai la Fondation Louis Vuitton, paquebot d’une grande beauté stylistique initiée par Bernard Arnaud, collectionneur plus formel et institutionnel, dont la vision programmatique de son musée est moins audacieuse que la Pinault Collection, portée par son mentor déambulant dans l’art avec l’œil de l’autodidacte cultivé, du voyeur instinctif, de l’homme libre qui n’a rien à démontrer, passé maître dans l’art de l’inattendu. Surprise garantie.
Photo : La Bourse du Commerce/Pinault Collection © D.R.