En cette période de fashion bashing, de no gender et d’inclusivité au forceps, les marques, les maisons, les créateurs, les stylistes et autres DA à haute teneur médiatique ne se laissent pas démonter par la pression et font la démonstration de leur talent. Beaucoup de collections féminines sont d’une stimulante inventivité avec en point de mire une portabilité (je sais ce vocable est affreux) et une élégance renouvelée qui puise moins dans le passé et se projette davantage (enfin ! devrait-on dire) dans le XXIe siècle.
À Milan et à Paris, les deux places fortes de la mode mondiale, les journalistes et les acheteurs planétaires, flanqués des incontournables peoples posés au premier rang comme des cerises sur un gros gâteau pour faire baver d’envie les boulimiques des réseaux sociaux, se sont régalés d’un foisonnement de propositions désirables. Les femmes qui ont l’appétit à lâcher du leste et quelques billets de banque pour plaire et se plaire, auront l’embarras du choix.
Le défilé (enfin un des défilés, car il faut savoir faire des choix) le plus emblématique est celui d’Antony Vaccarello pour Saint Laurent rattaché au groupe Kering. Le designer belge à la tête de la direction artistique depuis 2016 à fait forte impression. Après la californisation d’un Hedi Slimane qui, avant lui, avait électrocuté YSL en enterrant Yves pour la seconde fois, Antony Vaccarello a baladé son hologramme sans tomber dans un énième hommage stylistique dont personne ne veut.
Il a repris le vocabulaire Saint Laurent, mais avec l’argot de l’époque où on ne craint pas d’user de globish et d’onomatopées râpeuses pour faire claquer la dégaine et donner du style. En usant et abusant de latex licencieux, dentelles voyeuses, bottes cavaleuses, souliers perchés et seins dévoilés, Vaccarello a rendu grâce à la féminité fétichiste chère à YSL, féministe assumé, qui n’a jamais craint de sexualiser sa mode pour enfermer la femme objet au placard et mettre en lumière une femme sujet de son corps, de sa séduction, de sa libido, de sa domination érotique.
Dans une même veine sensuelle, le DA actuel nous rappelle au bon souvenir des ligues de vertu qui dans les années 60/70 se choquaient pour un sein vu derrière un voile de dentelle ou pour les images publicitaires du couturier signées par Bourdin, avec des femmes belles de jour et fétichistes la nuit, bien campées sur leurs jambes longues comme des canons de fusil.
Le féminisme est hautement salutaire pour dénoncer les pervers et les violeurs, mais terriblement délétère lorsqu’il oblige la séduction à baisser les yeux. Saint Laurent a retrouvé Yves et son bonheur à habiller les femmes pour ce qu’elles veulent : être belles à regarder, belles à désirer.
Photos : © Saint Laurent Paris