Comme toutes les activités non essentielles à la vie quotidienne, le luxe est à l’arrêt. Un arrêt brutal et une situation de crise cotonneuse dont il faut préparer la sortie. Non sans réfléchir à de nouvelles directions, à redonner du sens, à revenir à des fondamentaux, à se poser les bonnes questions sans être dans le déni de la croissance soutenue qui reviendrait au solstice d’été. L’âge d’or du luxe n’est pas fini, les entreprises du secteur ne sont pas dans la survie, tant elles disposent de cash pour tenir un siège, mais sans doute devront-elles adopter de nouveaux contours. Et aussi tirer partie de la situation en changeant de point de vue et en préservant un écosystème qui ne survit que par le mouvement, la création et la ô combien fameuse résilience dont se gargarisent les socio-marketeurs.
Moins consensuelles et plus clivantes, les marques de luxe ont su se définir des territoires d‘expression qui ont conquis des clients du monde entier, encore faut-il qu’elles retrouvent de l’attrait pour repartir de l’avant. Je ne crois pas à la formule du « rien ne sera comme avant » qui nous donne l’illusion que nous apprenons dans l’épreuve, j’adhère plutôt à l’accélération des changements des modes de consommation durables et raisonnés, dont l’ultime geste de coquetterie sera de ne plus dépenser à découvert, mais dans la frénésie choisie de la consommation.
Sur le plan commercial, alors que certains se réjouissent de cette imposture idéologique qu’est la démondialisation supposée être précipitée par cette crise sanitaire, il est temps au contraire d’engager une re-mondialisation. Le libre-échange est une source de prospérité, d’innovation et de progrès. Ce qui suppose de sortir de l’illusion des frontières fermées et d’une souveraineté nationaliste qui protégerait d’ennemis étrangers, forcément étrangers, comme les virus... Ce qui suppose de prendre en compte les réalités géopolitiques en étant moins opportunistes et en revendiquant une proximité plus réelle, plus « haptique » avec les clients. Combien d’entreprises sont-elles devenues sino-dépendantes, appâtées par ces hordes de Chinois aux poches pleines ? Et en acceptant l’idée que l’empire du milieu est une dictature capitalo-communiste (un comble !) conquérante aux ambitions de devenir l’alpha continent de la prochaine décennie…
Il est à parier que la vague de touristes chinois (mais aussi d’autres pays) ne va pas revenir de sitôt, tant que l’éradication du coronavirus ne sera pas effective aux quatre coins de la planète. Sans jouer les oiseaux de mauvais augures, la saison estivale va être tendue. Les entreprises de luxe devront continuer à raisonner global évidemment et à agir plus fortement local, avec pour chaque continent, chaque région, chaque pays, des campagnes de communication de proximité, des événements de voisinage, des opérations de séduction ciblées. Ainsi, les palaces parisiens, vidés de leurs clients, devraient dès maintenant mettre en place des initiatives commerciales pour inviter les Parisiens et les Parisiennes à passer une nuit ou une partie de leurs vacances à l’hôtel dans la capitale… Quoi de mieux pour apprécier une des villes les plus visitées au monde que dans le confort hors du monde, hors du temps d'un palace… La re-mondialisation c’est penser loin, penser grand et agir à proximité, à l’échelle de soi.
Si vous n’avez (toujours !) pas lu mon dernier livre, profitez de cette période de confinement pour plonger dans Le triomphe du Luxe cool… ça détend.
Il est disponible partout sur les plateformes digitales et aussi en numérique…