Ce week-end, nous étions à Deauville avec les étudiants du MBA2 de Sup de Luxe, la 30èmepromotion (et oui déjà !). Ce séminaire d’intégration, est un moment privilégié et une immersion dans le luxe, à l’hôtel Barrière Le Normandy, icône deauvillaise s’il en est qui accueille princes, rois, capitaines d’industries, stars et autres peoples en vue.
Avec moins de 4000 résidents fixes et des centaines de milliers de visiteurs de passage chaque année, Deauville est une extension des beaux quartiers parisiens, face à la mer, une station balnéaire qui a construit son image de marque depuis le second empire où des investisseurs avisés ont égrené des colonies balnéaires chics le long des côtes françaises : Cabourg, Houlgate, Villiers-sur-Mer, Trouville, Deauville…
Cette dernière, sortie d’un marais, va rapidement devenir une destination enviée sous l’impulsion du duc de Morny. Une frénésie immobilière démarre alors avec la construction de villas au style très éclectique. Le guide « Les bains de mer de Deauville » paru en 1868, y fait référence et écrit : « partout l'élégance, partout l'inattendu, partout la fantaisie dans ce qu'elle a de plus exquis et de plus ingénieux. Ici, un chalet russe aux délicates arabesques ; à côté, une maison hollandaise avec tour et pignon étayés ; plus loin, deux villas construites dans le style le plus pur de l'ancienne architecture anglaise, plus loin encore et sur tout le profil de la terrasse, une série de créations fantastiques, réunissant toutes les variétés et tous les genres, réunissant même toutes les nationalités. C'est ainsi que Suisses, Espagnols, Anglais, Américains, Hollandais, et même Turcs, réalisent par leurs excellents rapports le rêve si cher aux utopistes de la fraternité universelle ».
Au 20e siècle, les d’Ornano, monsieur puis madame respectivement maires de 1962 à 2001, vont asseoir la réputation haut de gamme de la ville normande et faire rayonner son aura au-delà des bocages, avec la création en 1975 du Festival du film américain. A leur suite, Philippe Augier, toujours l’édile actuel, va apporter une autre dimension à la ville, en cherchant à l’ouvrir davantage vers l’extérieur, tout en étant soucieux de ne pas se laisser dévaster par le tourisme façon Venise qui font fuir les habitants, mais en trouvant un équilibre (fragile) entre préservation du patrimoine et développement économique.
Pascal Leblanc, adjoint justement chargé du patrimoine et de la marque à la mairie de Deauville, a expliqué aux étudiants que la stratégie marketing de la ville a toujours été de demeurer sur son positionnement luxe, tant dans le choix des commerces, des hôtels, des lieux de vie… que des activités culturelles et de loisirs. La cité normande est aristocratique et dans le même temps suffisamment cool pour ne pas désespérer des nouvelles populations qui recherchent un souffle créatif, sans renier son ambiance bourgeoise gentiment décalée dans l’air du temps, baskets et foulard en soie…
Deauville réussit ce que savent faire les meilleures marques de luxe : être élitiste et populaire. Mais Deauville n’est pas une ville fashion, hystérisée par les tendances, elle marche à son rythme avec la sérénité des grandes dames que l’excès de botox n’a pas défigurées. Pascal Leblanc revendique ce choix d’un « branding » rigoureux qui préserve l’authenticité de la ville sans tomber dans un carcan historique étouffant ou à l’inverse s’abandonner dans un lâcher prise hors de contrôle. Et pour éviter un entre soi stérilisant, la mairie a créé une marque fille, « in Deauville », élargissant son territoire d’expression en regroupant 11 communes alentour (Bénerville-sur-Mer, Blonville-sur-Mer, Villers-sur-Mer, Saint-Arnoult, Saint-Gatien-des-Bois, Tourgéville, Touques...), une politique pour aérer la ville, souvent asphyxiée par les Parisiens, notamment le week-end, qui s’imposent un peu trop en conquérants. Le brunch du dimanche au Normandy en témoigne, il n’est pas toujours dans la ligne d’un luxe cool qu’on imagine…
Photo : Les étudiants de la 30epromotion Sup de Luxe (promo très sympa faut-il le préciser) devant l’entrée principale du Barrière Le Normady, accompagnés de Thibaut de la Rivière, directeur de l’école, Ghislaine Le Gouguec, directrice pédagogique, Isabelle Mocquant et moi-même, intervenants et soutiens fidèles.