Malgré leurs plus plates excuses et une flagellation publique, le duo Dolce & Gabbana vit un enfer médiatique et une descente au tréfonds du boycott en Chine, depuis la diffusion sur Instagram de deux vidéos montrant une Asiatique très sophistiquée, empêtrée à manger (tenter de manger, devrait-on dire) des pâtes et une pizza avec des baguettes… Ces films potaches ont enflammé les réseaux sociaux où les commentaires injurieux et les coups de menton nationalistes ont fusé.
Les deux compères jurent qu’ils ne sont pas racistes (on peut les croire) d’autant qu’ils réalisent peu ou prou 35% de leur chiffre d’affaires dans l’Empire du Milieu ! Seraient-ils assez stupides pour insulter des clients si importants ? Comment ont-ils pu être aussi naïfs en ignorant, qu’aujourd’hui, le monde est une allumette qui s’enflamme d’un rien sur les réseaux sociaux ? Pourquoi leur service de communication et/ou leur agence de pub ont-ils pu balancer de telles vidéos dans la résosphère, au final pas drôles ?
Si les réseaux sociaux créent incontestablement du lien, de l’échange, de la découverte, c’est aussi la chambre d’écho à la bêtise instantanée, à l’émotion épidermique, au mensonge organisé, et à la morale puritaine qui impose un politiquement correct castrateur et toxique. D’une société descendante avec des institutions qui organisaient le respect de l’autre, nous sommes passés dans une société ascendante où n’importe quel pékin devient un censeur patenté et un insultant qui éructe sa haine pour se soulager. Je me rends compte que je ne devrais pas écrire « pékin » au risque de froisser la sensibilité de nos amis chinois qui pourraient y voir une allusion xénophobe. Je corrige : où n’importe quel Duchmol commente et donne son avis en alimentant des fils d’actualité en flots continus qui ne sont plus que des trous sans fond et sans forme.
Alors qu’internet est un formidable outil pour apprendre et comprendre le monde, qui sert (qui devrait servir) à l’édification des consciences, il est devenu l’amphithéâtre des ignares qui bombent le torse pour mieux camoufler la petitesse de leur esprit, il est devenu un grand bordel marchand à marchandages, encrassé par les digi-pubards et les cons. Je corrige : les professionnels suffisants de la communication digitale et les personnes souffrant d’inculture.
Dolce & Gabbana ont été incontestablement maladroits, méritent-ils pour autant un tel lynchage ?
Je suis de nature optimiste, mais force est de constater que la révolution digitale pourtant si prometteuse, nous conduit droit dans le mur du populisme économique, politique, culturelle et sociale, un grave affaissement de nos démocraties polluées par des censeurs insensés, des dictateurs débilitants qui guillotinent la pensée. Il serait temps de prendre de la hauteur et de ne pas trop s’épancher sur de petites vidéos signées par deux créateurs de mode qui ont manqué de recul (et de jugeote !).
Image : D.R.